AQMI n'a rien à faire au Niger
Je voulais vous parler du report des élections de samedi 8 à mardi 11, du pourquoi, du comment, du petit retard des imprimeurs et de la contestation des partis politiques, de la rencontre entre le chef de l’Etat Salou Djibo et les 10 chefs des partis politiques, diffusée sur Télé Sahel ce soir (des mines fermées, des visages tendus, des discours enveloppants). Je voulais vous parler, bref, de politique nigérienne.
Mais AQMI en a décidé autrement. Je vais donc vous parler de la nouvelle irruption de ce groupe terroriste sur le territoire nigérien, avec ses visées totalitaires, nombrilistes, racistes pour tout dire.
Dans ce billet, il y aura un peu d’information, un peu d’analyse – modeste – et un grand coup de gueule.
La façade du maquis Le Toulousain, resté fermé samedi soir en hommage aux deux jeunes Français qui y ont été enlevés la veille.
J’ai connu, en 2002, un pays pacifique, d’une courtoisie spéciale, d’une civilité remarquable, où les usages (quels que soient les conflits par ailleurs) tissent autour des hommes un douillet environnement de proximité, de voisinage bienveillant, d’humanité, en somme. Où les voisins jouent aux dames ou à la belote, où les quartiers partagent fêtes et deuils, où les gardiens vous saluent par votre nom au bout de quelques jours, où chacun est lié à tous et où, même une étrangère, comme moi, est inexorablement aspirée par cette chaude émulsion collective.
C’est pour cela – et non pour autre chose – que tant de Français veulent revenir au Niger, parce qu’ils s’y trouvent bien, dans cette douceur de vivre ensemble ponctuée par l’art consommé de la plaisanterie.
C’est pour cela qu’Antoine de Léocour était revenu se marier au Niger, au sein d’une maisonnée de femmes toutes charmées par le jeune anthropologue. Il devait se marier le 15 janvier. Il a été tué il y a quelques heures lors d’un affrontement armé entre les forces de sécurité nigériennes et le commando d’AQMI, qui l’avait enlevé vendredi soir à une table du maquis Le Toulousain, avec son ami d’enfance venu assister au mariage.
C’est sans doute pour cela aussi que Michel Germaneau revenait régulièrement creuser des puits dans une zone perdue entre Arlit et la frontière malienne, avant d’être pris en otage et de mourir, dans des circonstances encore inconnues, en juillet dernier.
Je ne sais pas ce qu’il en est pour les otages d’Areva et de Satom, des expatriés sous contrat.
Mais je sais qu’AQMI a gâté notre Niger, notre tranquillité, notre esthétique de la paix. Des murs élevés, parfois hérissés de concertina, se dressent maintenant en ville. La police et la gendarmerie vont renforcer leur présence. Surtout, la méfiance va s’installer. Dans un pays où, lorsqu’on vous arrête, on vous écoute et on croit vos explications, parce qu’on cherche, instinctivement, à vous comprendre, les contrôleurs de tous acabits, comme ailleurs, vont prendre le mauvais pli, celui de la défiance.
C’est pour ça qu’il faut lutter résolument contre AQMI. Leur guerre, c’est en Algérie qu’ils la mènent (et qu’ils la perdent). Leurs horizons, leur langue, leurs obsessions n’ont rien à voir avec le Niger. Qu’ils règlent leurs problèmes ailleurs qu’au Niger, où personne ne les a appelés. Qu’ils cessent d’exporter leur violence autiste dans des pays qui ont autre chose à faire. Le Niger se débat dans la pauvreté, la crise alimentaire, les inondations, l’instabilité politique. Dans trois jours, il va passer à la phase finale de la transition militaire, qui doit s’achever par le retour de l’ordre démocratique le plus orthodoxe. Le Niger est engagé dans ses propres projets et besoins. Qu’AQMI retourne au diable d’où il vient !
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